L’entreprise industrielle de Clermont-Ferrand mène ce projet en partenariat avec la Compagnie maritime nantaise MN. Le concept initial est présenté en 2017 au Salon nautique de Paris, par une équipe d’ingénieurs suisses déjà bien connus dans le milieu de la voile : Édouard Kessi (cocréateur de la technologie 3Dl acheté par North Sails) et Laurent de Kalbermatten (concepteur en 1985 de la première voile conçue spécifiquement pour le parapente et qui a une grande expérience de concepteur lui aussi). La presse s’en est déjà fait l’écho. À l’époque, lors de sa présentation par ses deux inventeurs, l’IWS (pour Inflatable Wing Sails), est alors annoncée comme stable dans toutes les conditions de vent et ne créant que très peu d’efforts dans la structure ; de par son concept, elle permet également de se passer de winches, de drisses, de haubanage et d’accastillage complexe. Le groupe Bénéteau s’y intéresse à cette époque, mais rien ne filtre ensuite. Aucune collaboration officielle n’est à ce jour connue, mais d’autres attentions se portent sur le projet.
Pour bien saisir le contexte, il faut bien comprendre que la transition énergétique est capitale pour le transport maritime, les enjeux sont colossaux. En effet, il représente près de 90 % du commerce international de marchandises et est responsable de près de 3 % des émissions mondiales de CO2. Un chiffre qui pourrait même grimper à 17 % en 2050 si rien n’est fait, selon l’Organisation maritime internationale (OMI). Il est donc urgent d’agir, d’autant que l’accord de Paris prévoit une réduction de 50 % des émissions de gaz à effet de serre dudit secteur d’ici à 2050. La réglementation incite. Depuis le 1er janvier 2020 et l’entrée en vigueur d’une nouvelle norme de l’OMI, l’ensemble de la flotte mondiale de navires de commerce ou de croisière doit utiliser un fioul à basse teneur en soufre pour réduire ses émissions polluantes. Un changement auquel raffineurs, armateurs, constructeurs et financiers se sont préparés depuis quelques années. Mais il faut aller plus loin, et de nouveaux acteurs se penchent sur des solutions alternatives. Le vent en fait partie. L’hydrogène également, mais tout dépend de la taille des navires.
Après un partenariat dont nous ne connaissons pas les contours, Michelin annonce que la première étape du projet basé sur la technologie suisse IWS va se concrétiser en 2022. Le navire MN Pélican, porte-conteneurs de la Compagnie maritime nantaise, qui assure des rotations entre l’Espagne et la Grande-Bretagne pour le compte de Britanny Ferries sera ainsi équipé de ces ailes d’un nouveau genre.
« Notre raison d’être, c’est d’offrir à chacun une meilleure façon d’avancer », a expliqué Florent Menegaux, P.-D.G. du groupe, invité de BFM Business en juin 2021. « Nous cherchons en permanence à savoir comment nous allons travailler à une meilleure mobilité » et « à comment nos métiers vont évoluer demain », a-t-il déclaré.
Si à ce stade de la lecture, vous cherchez encore le lien entre Michelin et le transport maritime en vous demandant, sans mauvais jeu de mots, « mais que diable vont-ils faire dans cette galère… », ne cherchez plus… vous avez la réponse dans la raison d’être, récemment revisitée, du groupe Michelin.
Une meilleure façon d’avancer est une polysémie, mais elle revêt un sens tout particulier quand on pense au métier historique du groupe de pneumatique. Outre le fait de porter un message RSE non dissimulé, cette nouvelle raison d’être étend naturellement le secteur d’activité du groupe pour les cent prochaines années…
À l’heure où la mobilité est un enjeu de société international et où l’automobile dans sa forme actuelle est sur le déclin, Michelin se dote d’une raison d’être inspirée qui lui ouvre un champ d’exploration bien plus large et qui ne l’enferme pas dans un secteur à l’avenir incertain.
C’est ici que nous pouvons, grâce aux missions que nous menons auprès de nos clients sur ce sujet ô combien stratégique, affirmer que la raison d’être d’une organisation doit être un élément structurant et indispensable d’une stratégie long terme permettant d’ouvrir de nouveaux horizons et de nouveaux modèles d’affaires, mais aussi de faire des choix. Tout ce qui n’est pas cohérent avec la raison d’être ne doit pas être priorisé dans le plan stratégique. Bien sûr, des initiatives de diversification radicales peuvent exister, mais elles doivent avoir un lien avec la raison d’être ; dans le cas contraire, il s’agit éventuellement de créer des co-entreprises (émanation indépendante de la structure mère avec un destin incertain quant à sa réintégration).
Et vous ? Quelle est votre raison d’exister ? En dehors du simple profit qui ne doit pas être partie prenante dans sa formulation…