Même si le pays Basque et les côtes landaises sont réputées dans le monde entier, au point d’en devenir « the place to be » en été depuis le début des années 80 et l’arrivée des grandes compétitions (au nombre des atouts de la french coast il faudra ajouter l’extraordinaire image des femmes françaises à l’étranger), l’épicentre du surf a toujours été anglo-saxon (Californie, Australie), tandis que le summum de l’exotisme se baladait entre l’Indonésie, les Philippines. Hawaii tenant le rôle du paradis et de l’enfer à la fois.
Au cours des trois dernières décennies, en grande partie sous la pression des grosses marques de vêtement (les fameuses « majors » du surfwear qui après nous avoir fait rêver, ont sérieusement bu la tasse dans leur course au gigantisme), le surf a pris un virage commercial sans précédent. L’image du surf s’est en partie « normalisée », le circuit mondial (ASP) calquant son fonctionnement sur les sports traditionnels, multipliant les épreuves, cherchant au maximum les retombées TV, maximisant l’exploitation commerciale. Qu’en est-il ressorti ? Une prédominance de la compétition, du surf agressif, de la performance, quelques stars (Slater, Irons) et une bizarre impression de « world company ». L’opposé de ce qu’était censé incarner le surf.
L’émergence ou le renouveau du longboard date également des années 80. Ce n’est peut-être pas tout à fait une coincidence et il n’est pas déplacé de dire qu’il y a une nouvelle « contre-culture » du surf.
Bella Vita est un film de surf réalisé par Jason Baffa dont nous avons abondamment parlé ici. Tout comme nous avons relayé des films comparables.
L’Europe peut-elle réinventer la culture surf ?
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Le surf et ce qui reste de la contre-culture
Les italiens inventent le film d’auteur en surf
Dans ce deuxième trailer, on perçoit que la dimension « culturelle », qui fait tout le sel de ce film est poussée encore plus loin. L’Europe peut en effet ré-inventer la culture surf et certaines marques s’y emploient, nous y reviendrons très prochainement, car il y a des choses très intéressantes à développer entre la réalité de la pratique et la scénographie « proposée » par un sport. Si le décalage est trop grand, un lien se distant et c’est en ce sens que ce film ainsi que d’autres initiatives sont bonnes à prendre. Il replace le surf européen dans son contexte, re-dessine une pratique, propose une alternative, un autre modèle auquel s’identifier.
Terminons si vous le voulez bien par une aparté (osée) sur le marketing de contenu. Il est aujourd’hui avéré que le « contenu » est un moyen très efficace pour une entreprise, une fédération ou une institution, non seulement de se faire connaître, mais d’expliquer sa philosophie, son action, de relayer son message, de mettre en avant un produit. Non plus un martelant un slogan forcément limité, réducteur et aujourd’hui usant mais en allant vers son audience de façon structurée. Grâce aux possibilités offertes par le réseau au sens large du terme (site internet, blog, réseaux sociaux), une entreprise, une fédération ou une institution peut devenir son propre média. Le challenge est tentant mais l’exercice nécessite de la réflexion, une stratégie, un savoir faire. Tout le monde a accès a internet, tout le monde ne sait pas comment s’y prendre.
Que nous dit ce film ? Que sur un sujet donné, il y a toujours une approche nouvelle à trouver, un discours alternatif possible. Que pour se démarquer du bruit de fond, s’écarter du discours mainstream, il faut faire preuve de personnalité. Le contenu, c’est du texte, des photos et de plus en plus de vidéo. Ce qui fera la différence, c’est l’audace, la personnalité, l’approche.
Le travail de Baffa a été salué jusqu’en Californie. « Surf, Famille & Tradition », sincèrement il fallait oser. Ce qui est vrai pour une oeuvre créative peut l’être aussi pour le contenu. Le marketing est l’art d’emballer les choses, mais c’est peut être l’heure de gagner en transparence et en sincérité.
Rediffusion codezero. Billet initialement publié le 12 février 2015.