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De la culture surf à l’aménagement du territoire

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Nouvelle rediffusion d’un post typique de l’approche de Codezero. S’attarder sur le fond, se pencher sur les racines culturelles et sociétales des nouvelles tendances sportives. Billet paru initialement en février 2014 alors que Codezero n’était encore qu’un blog où nous posions les fondations de notre réflexion. 

On trouve sur le net, et c’est surprenant, beaucoup de thèses et autres rapports qui abordent l’évolution du sport, la sociologie et le changement que représente l’arrivée des sports de glisse. Nous en parlons régulièrement ici-même, c’est même la raison de l’existence de Codezero.

« Les nouveaux territoires du surf dans la ville » est sans doute l’une des publications les plus intéressantes qu’il nous ait été donné de lire parce que leurs auteurs ont effectué un travail en profondeur, très bien documenté et qu’ils portent un regard très lucide sur les sports de glisse et autres sports alternatifs. Initialement, ce rapport, publié en 2009, avait pour but de savoir comment intégrer au mieux certaines nouvelles pratiques, en l’occurrence le longboard (les grands skates) dans la ville de Montréal. D’où la nécessite d’analyser et de comprendre. Dans l’absolu, c’est bluffant, il y a peu d’exemples d’une telle ouverture d’esprit en France, sauf en ce qui concerne le surf dans le sud-ouest. Pour tout dire, nous sommes également tombé sur un rapport concernant la Réunion : « Le rôle des sports côtiers dans le développement territorial de l’Ouest de La Réunion : entre nouvelle maritimité et jeux d’acteurs ». Mais des années plus tard, la Réunion a du s’adapter à une situation inédite, nous en reparlerons très prochainement.

Derrière tout ça, il y a des enjeux de société et des opportunités (économiques notamment) complètement ignorées. Ce rapport va bien au-delà puisque il plonge très profondément dans l’analyse même des nouvelles tendances du sport en général, va très loin  dans la compréhension des mécanismes sociologiques en cours.

Le résumé du rapport : la culture surf qui a tant marqué la côte ouest américaine à partir des années 1950, culture qui s’est mondialisée et commercialisée avec plusieurs tendances toutes aussi variées et inusitées les unes que les autres, a créé un univers aux proportions imposantes dans les dix dernières années. L’industrie du divertissement, du sport et du loisir est au centre de cette révolution, mais aussi celle du vêtement, de la mode et d’autres produits dérivés. Plus significatif encore, le surf original a influencé plusieurs pratiques sportives tant sur l’eau que sur terre ou sur neige, et désormais les intervenants touristiques de même que ceux en aménagement du territoire doivent s’adapter et composer avec ces nouvelles réalités. L’article dressera un panorama de cette constellation d’activités, qui ont le surf comme point de départ, et de leurs évolutions récentes. Puis, plus spécifiquement, il sera question des impacts de ces activités sur l’espace urbain à travers des modes d’appropriation de territoires en apparence plutôt inadaptés aux « sports de glisse ».

En voici quelques extraits :
Culture surf et sports de glisse

Il est plutôt difficile de différencier avec précision les sports alternatifs des activités sportives traditionnelles. On qualifie une activité de « sportive » lorsqu’elle regroupe simultanément trois composantes : une dimension ludique, une dimension compétitive (contre soi, autrui ou un groupe de personnes) et finalement un effort physique important (Augustin, 1994 : 15-16). Les sports traditionnels organisés ou non contiennent ces trois éléments. Or, dans les trois dernières décennies, une nouvelle gamme d’activités qualifiées aussi de sportives est apparue, mais avec des labels les distinguant des pratiques socialement et culturellement reconnues, bien établies et parfois institutionnalisées. Sports extrêmes, sports alternatifs, sports post-modernes, sports – mode de vie sont autant de dénominateurs appliqués à une gamme très diversifiée et très complexe de pratiques sportives moins populaires, distinctes des sports traditionnels et qui se démarquent par leur carac-tère de contre-culture, non-intégré à une culture sportive dominante, soucieuses de créer une image distincte, parfois rebelle et liée à un besoin d’altérité identitaire (Pégard, 1998; Karsten et Pel, 2000).

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Pratiquer des sports de «planche» représente pour plusieurs de ses adeptes, une forme de liberté et de créativité dans l’univers parfois envahissant de la performance physique, de la compétition et des normes ou contraintes qui régissent certaines activités sportives. Surfer une vague, la neige ou la rue c’est surtout se déplacer, moyennant un effort physique bien sûr, mais dans un mode déambulatoire, flexible, libre au niveau des mouvements ou des trajectoires empruntées. La sensation prend le dessus sur la prestation. L’expérience et les plaisirs générés supplantent les résultats et les records mesurés. Tout l’intérêt des sports de glisse depuis l’apparition de la culture surf réside dans de nouveaux «rapports au corps, d’autres rapports à l’autre, d’autres rapports à l’environnement, bien différents de ceux qui ont été historiquement prônés par le sport olympique. En réalité, la glisse apparaît comme un processus d’évolution à la fois culturelle et technique.» (Loret et Waser, 2001 : 17). Les valeurs dominantes véhiculées par la glisse confrontent certains stéréotypes sur le sport lui-même telles la concurrence, la justice et l’égalité des chances. Qu’ils soient qualifiés d’extrêmes ou d’alternatifs, les sports de glisse se caractérisent plutôt par une hiérarchisation acceptée des pratiquants, la libre créativité dans les styles de pratique de même que la connivence/complicité entre pratiquants (Loret et Waser, 2001). Glisser dans le paysage montagneux (l’escalade libre sur des parois, les descentes de luge de rue), le paysage nautique (vagues de mer et de rivières, vagues provoquées par des embarcations spécialisées) ou le paysage urbain (la rue, le mobilier, les espaces publics), c’est d’abord découvrir et s’approprier des sites inattendus, atypiques avec des références nouvelles à des sous-cultures artistiques, et plus globalement à des modes de vie particuliers. La glisse « s’inscrit pleinement dans une mouvance sociale qui valorise l’instantanéité, le libre accès, l’absence de structures hiérarchiques et l’autorégulation. » (Loret et Waser, 2001 : 17-18).

Références : Les nouveaux territoires du surf dans la ville

Sylvain Lefebvre, Professeur
Département de Géographie Université du Québec à Montréal
Romain Roult Doctorant
Département d’études urbaines et touristiques Université du Québec à Montréal

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