Prenons l’exemple du très haut niveau en moto pour parler globalement de spectacle sportif et de fan expérience.
L’édition 2023 du Championnat du monde de MotoGP vient de débuter le week-end dernier à Portimao au Portugal. Le circuit compte cette année 21 étapes et le déroulement de chaque week-end de Grand Prix est très différent de l’année passée. Pour résumer, l’enchainement de toutes les phases (essais, warm-up, course) est plus dense, chaque phase est plus courte sauf les épreuves en elles-mêmes. En catégorie reine, une épreuve Sprint est greffée sur le programme du samedi.
Beaucoup de progrès ont été réalisés sur la captation d’images, enjeu majeur du spectacle sportif d’aujourd’hui.
Ceci afin de répondre aux besoins des chaines de télévision et des réseaux sociaux avec du live et une multitude d’extraits et de capsules photos, vidéos et même son (interview et bruit des moteurs en live). Le sentiment d’immersion est impressionnant.
Revers du dispositif, les pilotes sont beaucoup plus exposés. Doublement. On leur demande plus de présence, davantage de disponibilité pour le public, ils sont aussi plus sollicités en piste, les premières critiques n’ont pas tardé, le débat est lancé, les blessés de ce premier week-end attestent de la pression commerciale. C’est bien de cela, dont il est question.
La moto est un exemple parmi d’autres, le spectacle sportif s’accélère et semble peu concerné par les enjeux qui agitent la société (le climat, l’énergie, le besoin de ralentir).
Les grands tournois de football se multiplient et concernent toujours plus d’équipes, de nouveaux pays entrent sur ce grand marché, le « soft power » ayant encore de beaux jours devant lui. Pour beaucoup d’acteurs, le sport reste un moyen privilégié pour gagner en visibilité, en notoriété, toucher des « cibles », rayonner, se faire une place au milieu des nations.
Trois problèmes sont liés à ce modèle :
Les risques de saturation, de lassitude que génèrera à force la multiplication des rendez-vous, le décalage entre les choix des grandes institutions et le grand public, sans parler des multiples revirements de diffusion obligeant à multiplier les abonnements ou à faire d’autres choix.
Si la « fan expérience » augmente l’interaction, elle est avant tout un vecteur de monétisation. Avec des acteurs comme les jeux en ligne, l’alimentation ou l’automobile donc la consommation de masse et ses effets collatéraux (addiction, obésité, pollution), le football ne montre pas l’exemple mais les autres secteurs pas davantage.
Enfin, une recherche de croissance effrénée qui cadre mal avec les grands objectifs en matière de protection de l’environnement. Pour ne citer que deux exemples, Gianni Infantino ne semble pas s’en inquiéter, l’interview lunaire de l’ex-président de la F.I.S Gian Franco Kasper témoigne du même désir de croissance économique sans s’embarrasser d’interrogations morales, son successeur Johan Eliasch n’est pas plus rassurant.
Le sport n’a pas encore fait sa révolution philosophique et à court terme, ne le fera qu’à la marge. Pour en revenir au sujet du départ, les sports mécaniques se portent plutôt bien. On peut les trouver passionnants, combien de temps encore apparaîtront-ils acceptables en l’état ?