Décathlon travaille sur un exosquelette destiné à la randonnée. Un ensemble de sujets résonne dans cet exemple particulier : la communauté, le rapport à l’effort, l’environnement et la santé.
On parle d’effort assisté. Deux exemples, très différents, viennent à l’esprit : le vélo électrique et le Ski Mojo. Le premier est connu de tous, le second uniquement des utilisateurs convaincus en station, mais c’est une réussite.
Les deux facilitent, augmentent ou rendent possible une pratique.
L’exosquelette de marche proposé accompagne l’effort des cuisses ; il est proche de l’esprit du Ski Mojo. C’est un bon exemple de l’exodarwinisme dont parlait Michel Serres.
« Moins d’efforts, plus d’ascensions, de plaisir et de souffle pour discuter même en montée. » La cible ? « Les randonneurs tentés de s’aventurer sur des sentiers jusqu’alors trop difficiles pour eux. Mais aussi tous ceux, jeunes ou moins jeunes, ou en petite forme, qui voudraient augmenter significativement leur temps de marche sans s’épuiser. »
Le message est clair : c’est une promesse de facilité. Le constat est vrai pour le vélo électrique. Si une assistance facilite l’accès à un sport ou à un loisir, pourquoi pas, il y a des effets très positifs.
Cet exemple précis nous invite cependant à repenser notre rapport au sport :
– L’effort : Le sport s’est construit sur le rapport à l’effort. Cet état de fait persiste, même si l’évolution des années 60-70, résultant d’une société plus individualiste et tournée vers la satisfaction, a bousculé ce modèle. Or, l’effort en randonnée, même lorsqu’il est relatif, est structurant voire identitaire ; il est souvent revendiqué.
– La communauté : Certaines pratiques sont par nature assez exclusives : l’alpinisme, le surf, l’ultratrail, l’athlétisme, le vélo de route et tant d’autres. Leur caractère élitiste participe à leur philosophie et aux motivations qui en découlent. L’accession passe par un apprentissage difficile et se regrouper par affinité, par appartenance, cimente les liens. C’est précisément l’un des ressorts utilisés par Nike (et d’autre) récemment.
– L’environnement : L’accès au plus grand nombre pose question à l’heure de la sur-fréquentation des sites naturels. Il se fera aussi au prix d’un produit dont l’impact sera non négligeable (moteur, batterie) dans une pratique à l’équipement par essence très basique.
Le développement du sport assisté participe à l’idée d’une sorte de « gratuité physique », ou tout du moins d’une réduction de l’effort. Ce « prix réduit » devenant justement la promesse. L’avenir dira si cela aura un effet incitatif positif ou si, finalement, c’est la « facilité » qui sera retenue et dominera.
Si notre système de santé est un acquis social, la « forme physique » – qui est un état nécessitant une hygiène de vie et, soyons clairs, des efforts répétés dans la durée – ne le sera jamais.
C’est un vrai sujet de politique publique … et de stratégie de marque.