Porteur de rêves, messager d’un monde composé de reliefs, de neige, de roche et de glace qui contraste avec l’univers digital et virtuel omniprésent, le métier de guide de haute montagne ne ressemble à aucun autre. Hautement archaïque, mais servi par un matériel de pointe, tour à tour « Conquérants de l’inutile » et Don Quichotte d’un univers de risques et de beauté, le métier tel qu’il a été pratiqué par les générations précédentes est en pleine mutation. La pression des plateformes numériques, les contraintes administratives grandissantes, l’acceptation du danger, et surtout, les bouleversements climatiques font partie des nouveaux membres de la cordée. Si les défis qui bousculent la profession semblent immenses et vertigineux, les capacités d’adaptation qui la caractérisent le sont tout autant.
Accéléré par la pandémie et le confinement, la bascule vers le numérique touche aussi les guides de haute montagne. Proposer une offre claire, attrayante, qui s’inscrive, dans la tradition, mais qui emprunte les tendances et s’intègre dans l’air du temps n’échappe pas à la profession. Bien qu’un guide sur deux soit pluriactif et adhérent à un bureau, cela ne les soustrait généralement pas d’une démarche commerciale attractive. Aujourd’hui, cette proposition est principalement numérique. Au site Internet qui affiche programme, possibilité de réservation et parfois de paiement, s’ajoutent les réseaux sociaux qu’il faut, à l’image d’un « tonneau des Danaïdes » sans cesse alimenter. Certains font même l’effort d’écrire et de diffuser des newsletters qui ont pour objet d’informer, de faire rêver et de fidéliser une clientèle certes connectée, mais aussi plus « volage » et toujours sensible à de nouvelles propositions. Pour ceux qui en ont la possibilité, les articles rédigés dans la presse spécialisée ou les récits d’expéditions permettent également de se différencier, de partager une approche du métier souvent singulière et d’orienter les pratiquants sur l’offre que l’on souhaite développer. Cela peut être le ski, l’itinérance, l’apprentissage auprès de collectivités, les voyages lointains ou encore l’ascension des plus classiques 82 sommets de plus de 4 000 mètres qui jalonnent l’arc alpin. À noter qu’en termes d’image, les « voyages de proximité » créatifs et le plus « decarbonés » possible semblent prendre l’ascendant sur la pratique de l’héliski, dont bientôt, à l’instar de la chasse aux grands fauves, il faudra taire la pratique dans les Alpes.
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